Dans le contexte de la pandémie de COVID-19, qui exige qu’on fasse chacun sa part en restant à la maison et en pratiquant la distanciation sociale pour lutter contre la propagation du virus, bien des gens ont trouvé une nouvelle façon de se changer les idées : rêver à de futures destinations de voyage. Si vous avez envie de vous évader du quotidien, nous avons un récit inspirant pour vous : l’histoire fascinante d’une jeune femme d’Ottawa qui a parcouru le Canada en fourgonnette, avant l’apparition de la COVID-19 bien sûr. Elle en retient notamment une belle perspective sur la durabilité et la consommation d’énergie.
En août 2018, Sarah Patterson, 30 ans, a commencé son périple canadien dans une fourgonnette Dodge Ram 1998, surnommée Rogue, après avoir passé un an et demi à planifier son aventure.
Il lui a fallu cinq mois pour isoler et aménager l’intérieur du véhicule avec des armoires, une cuisine escamotable, du bois sur les murs et un revêtement de vinyle pour le plancher. Elle a aussi beaucoup réfléchi à ses besoins en électricité afin de voyager et vivre le plus possible dans le respect de l’environnement.
D’Ottawa à St. John’s, Terre-Neuve, jusqu’à Tofino, Colombie-Britannique, puis de retour vers Ottawa, Sarah et sa chienne Rory ont vu de près des splendeurs naturelles du Canada auxquelles la plupart des gens ne pourront que rêver. Dans cet article, Sarah raconte les hauts et les bas de son aventure et explique ce qu’elle a appris au fil de son parcours.
Qu’est-ce qui vous a inspirée à partir à l’aventure?
Comme bien des gens à la fin de la vingtaine ou au début de la trentaine, je n’étais pas entièrement satisfaite de la vie que je menais et je voulais connaître la vie de bohème en fourgonnette que je voyais sur Instagram – et que j’enviais. En fait, la réalité est très différente de ce qu’on voit sur les réseaux sociaux… quelle révélation!
Vous êtes-vous fixé un but, un objectif?
Je voulais repousser mes limites et remettre en question ma vision de la vie; casser ma routine et me forger un nouveau mode de vie. Juste la planification et l’aménagement de la fourgonnette m’ont fait découvrir toutes sortes de nouvelles habiletés et compétences. Le voyage m’a fait toucher le fond et rebondir; il m’a prouvé à quel point je peux être ingénieuse, adaptable et résiliente. Je suis très fière de ce que j’ai accompli et des nombreux petits échecs qui m’ont appris à me surpasser et à sortir grandie de ces expériences.
Est-ce qu’un mode de vie durable était une priorité pour vous au départ?
En raison du type de budget dont je disposais, c’était essentiel. J’ai géré aussi efficacement que possible ma consommation d’électricité et de carburant ainsi que mes provisions d’eau et de nourriture. Ça m’a montré à quel point je pouvais me contenter de peu et dans quelle mesure j’avais vécu dans l’excès auparavant.
Qu’est-ce qui vous attirait dans cette vie de nomade en caravane?
J’adorais voyager et j’avais fait beaucoup de voyages avec un sac à dos dans ma vingtaine. L’année d’avant, j’avais adopté un chiot – une femelle berger australien miniature du nom de Rory – et je tenais à ce qu’elle fasse partie de ma nouvelle aventure. J’avais visité tant d’autres pays par le passé, mais je ne connaissais pas bien le Canada et je voulais découvrir des lieux mythiques comme Terre-Neuve. Je misais sur la liberté, l’indépendance et l’autonomie que la vie en caravane m’apporterait.
Parlez-nous de votre système d’énergie solaire et de stockage sur batteries.
Je tenais à avoir une source d’énergie efficace. Entre zéro source d’énergie pour ma fourgonnette et une installation électrique très onéreuse, j’ai opté en quelque sorte pour un système intermédiaire.
Avec seulement 5 000 $ à dépenser pour mon matériel de transformation, j’ai acheté deux batteries externes de 6 volts et, avec l’aide d’un ami beaucoup plus compétent que moi, j’ai raccordé un répartiteur de charge de 100 ampères, un contrôleur de charge de 100 ampères – avec boîtier à fusibles – et un moniteur de batteries à DEL. Ce système me permettait de surveiller de près les volts qui sortaient de mes batteries et y entraient, et me donnait deux options pour les recharger. Une option était de compter sur la transmission de la fourgonnette lorsqu’elle roulait; l’autre était un panneau solaire portatif de 150 watts que j’installais quand je campais.
Ce système à batteries m’a permis de faire fonctionner mon réfrigérateur-congélateur portatif CA/CD de 2,1 pieds cubes, ma hotte de ventilation à 3 vitesses, mes luminaires DEL et mon contrôleur de charge que je branchais dans mon ordinateur et mon téléphone mobile.
Je pouvais utiliser du courant pendant à peu près deux journées complètes avant que ma réserve chute à 11,90 volts environ et que je doive recharger le tout.
Comment votre consommation d’énergie et vos habitudes ont-elles changé en vivant en camping par rapport à la vie à la maison?
On finit par devenir essentialiste : on achète et on utilise seulement ce qu’il faut pour la journée et on planifie la semaine en fonction du rythme de consommation. Chaque jour, je savais exactement quelle quantité d’eau il me restait, la quantité d’énergie que j’avais dans mes batteries, la nourriture qu’il me restait, l’essence que j’avais dans mon réservoir et la distance qui me séparait de la prochaine station-service.
Comment c’était de voyager seule (avec Rory bien sûr)? Est-ce comparable à la période de distanciation sociale qu’on vit en ce moment?
J’avais toujours pensé que j’apprécierais la solitude, mais en réalité ce voyage m’en a fait vivre beaucoup trop. Je suis partie d’une vie où je travaillais à temps plein, où je m’affairais à transformer ma fourgonnette dans mes temps libres tout en voyant mes amis et ma famille, à une nouvelle vie où je devais passer un temps infini toute seule à parcourir le pays. Le bon côté, c’est que ça m’a incroyablement préparée à vivre la présente quarantaine et à la nécessité absolue de faire des marches et de calmer mon esprit à l’aide de la méditation.
Quels sont les principes clés que vous avez acquis de votre expérience? Comment influencent-ils votre vie à la maison aujourd’hui?
Je suis très certainement plus habile avec les machines et les outils. J’essaie maintenant de remettre à neuf et de réparer plutôt que de remplacer – et je n’ai jamais été aussi ravie d’avoir un appartement avec une douche! Je ne tiendrai jamais plus pour acquis le contrôle de la température. Le summum du luxe, c’est de pouvoir assurer son confort et de n’avoir jamais trop chaud ou trop froid.
Si vous deviez recommander trois changements simples que tout le monde pourrait adopter pour avoir un mode de vie plus vert, quels seraient-ils?
- Isolez tout. Je n’avais jamais compris à quel point c’est important jusqu’à ce que je passe une nuit à moins 10 degrés dans ma fourgonnette, emmitouflée dans tous mes vêtements et collée sur mon chien sous les couvertures pour garder un peu de chaleur.
- Les panneaux solaires coûtent cher, mais lorsque je vais acheter une maison, je vais investir pour en couvrir mon toit au complet.
- Ma hotte de ventilation est la meilleure chose que j’aie achetée pour ma fourgonnette. La possibilité d’expulser la chaleur à l’extérieur durant les chaudes nuits d’été m’a gardée en vie d’innombrables fois.
Qu’avez-vous appris sur vous-même?
Je vais dire quelque chose de très cliché, comme une tirade à la fin d’un film trop mélo… En me « perdant » complètement et me privant de tout confort – physique et mental –, j’ai réellement découvert ce dont je suis capable et la personne que je veux être. Aussi, les livres audio sont fantastiques : « faire le plein » de tous les livres de Brené Brown a été la meilleure thérapie que je pouvais m’offrir.
Nous espérons que l’histoire de Sarah met un baume sur les nombreux défis que vous avez dû relever pendant le confinement, mais aussi qu’elle est source d’espoirs et de rêves quant à la perspective de voyager à nouveau de façon durable lorsque la pandémie sera derrière nous.